Lame
Lame développe une confiance inébranlable
en Rel, ainsi qu'un caractère complexe, qui se place sous
le signe de la réussite.
Elle a une apparence physique double ; tantôt elle
est grosse et laide, ce qui l'humilie et lui permet de travailler
avec sa haine d'elle-même (Lame, Or) ;
la plupart du temps, elle est splendide avec ses longs cheveux
noirs, sa robe rouge et son apparence énergique et jeune.
Comme Anar Vranengal dans la série de Vrénalik,
Lame est absente des rêves qui servent de source au texte ;
elle arrive plus tard dans le processus de création, quand
j'ai besoin de ce genre de personnage pour servir de lien, de
porte-parole ou pour introduire quelque chose. En dépit
de sa personnalité forte, elle s'exprime surtout dans
le registre de ce qui est admissible et elle apprend de ses erreurs.
On peut comprendre qu'elle résiste aux enfers mous (Lame),
qu'elle soit choquée par le comportement de Rel (Aboli),
qu'elle se réconcilie avec lui (Ouverture), qu'elle
libère le bec de l'oiseau Tryil (Secrets), qu'elle
trouve abominable de devenir une larve (Or). Elle tiendrait
tête à Dieu le Père s'il le fallait (Sorbier).
Sa révolte a quelque chose de sympathique. Il lui appartenait
d'ouvrir la série des Chroniques..., comme il appartenait
à Anar Vranengal d'ouvrir Vrénalik en étant
la narratrice d'En Hommage aux araignées.
Lame a son panache. Elle parle de son nom dans Sorbier
au passage suivant (chapitre intitulé « L'arbre,
le monument et la strophe»): «Être libre, c'est
contempler le gouffre amer de son esprit. Tu parlais tout à
l'heure de l'objectivité à cultiver, pour voyager
vers la sagesse. La voici, dans ces vers. C'est une objectivité
libre, avec une belle prestance. Il y a des miroirs, de l'océan
et des gouffres. Voilà l'une des raisons pour lesquelles
j'ai choisi ce nom de Lame. Lame comme dans l'Amérique,
Lame comme l'âme aux enfers, Lame comme une carte de Tarot,
Lame comme une pierre tombale en langue ancienne. Lame comme
une lame de couteau, de rasoir ou de sabre. Et, finalement, Lame
comme une lame de fond, venant des profondeurs marines, qui peut
noyer les nageurs imprudents et faire couler les navires. Lame
comme une grande vague qui déferle sur le rivage. »
Lame, ou Anar Vranengal, ont quelque chose de creux, ou encore
de magnifiquement souple. Souvent je les présente pour
que le lecteur s'identifie à elles ; parfois, par
contre, je leur donne assez d'étrangeté pour causer
un doute. Elles ont une dimension charnelle, parce que ce sont
des femmes comme moi, et je peux me baser sur ma propre sensualité
pour exprimer la leur. Si Rel a de vagues racines amérindiennes,
Lame a clairement des racines québécoises francophones.
Elle est le lien avec ma culture.
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