Illustration : Vincent Morin |
« Mais c’est-tu une histoire d’amour, La Griffe du Diable ?
— C’est ce que devient une histoire d’amour quand le Diable s’en mêle ! Retiens ben la leçon, mon gars : vaut mieux pas s’penser plus malin que le Malin lui-même. »
Ainsi commence le récit de Benoit Larose, le cook du chantier. S’il avoue volontiers que ses histoires sont souvent « embellies », celle-là, celle d’Alexis Dubois, le malheureux, le damné, il jure qu’elle ne l’est point, parce qu’il était là, qu’il a tout vu.
C’était il y a vingt ans, dans ce même chantier des pays d’en haut où les hommes peinaient tout l’hiver, loin de leurs femmes. Pour oublier sa belle Roxanne, Alexis travaillait comme dix, infatigable. Il a presque fallu lui arracher des mains sa hache pour qu’il vienne partager le souper du jour de l’An avec les autres. C’est dire s’il était vulnérable aux belles paroles de Baptiste Labrèche, le contremaître du chantier voisin, quand il lui a affirmé connaître un moyen de rejoindre sa belle, le temps d’une nuit… à condition de pas être peureux.
Piqué par l’orgueil, mû par le désir, Alexis saute dans la chasse-galerie derrière Labrèche. Mais si le canot magique les conduit bien comme promis à Saints-Martyrs-des-Damnés, ils risquent tous au retour d’aller au Diable !
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